Le viagra, enfin pour elles, nos femmes
Le viagra, enfin pour elles, nos femmes
Aujourd’hui, j’apprends par la presse que le « viagra pour femmes » comme « on » le nomme va très probablement être commercialisé aux états unis. Je ne peux m’empêcher de tiquer.
Je vois passer régulièrement ce que j’appellerai des traits d’esprits sur la toile dénonçant ou tout du moins énonçant la différence de traitement de certains symptômes entre ce qu’ils sont décrit par les hommes ou par les femmes. Le dernier qui me vient à l’esprit est : « si les hommes avaient un ovaire, cela fait longtemps qu’il existerait des congés pour les périodes de règles ».
Ces tweets sont souvent largement retweetés, partagés. Cela peut laisser imaginer que l’idée est partagée par d’autres et que le sentiment de différence de prise en charge est partagé également. Et surtout, je pense que cela fait rire, voire sourire. Après tout, il est commun de penser que les hommes vivent moins de contraintes corporelles que les femmes. Ils ne se rendent pas compte des désagréments que ce fameux cycle hormonal. Du coup, la recherche en ces domaines a prit du retard, attendant que les femmes puissent en nombre accéder à des postes à responsabilité leur permettant d’orienter la recherche vers ces problèmes-là.
En attendant on rit on rit, on partage ces petites blagues entre nous et…rien.
Et puis ce matin je lis donc cette dépêche sur le « viagra féminin ». Dans ce contexte ou tout objet voit sa déclinaison en version Femina apparaître (en rose flashy de préférence), j’imagine que le viagra féminin sera rose, peut être vendu en petite pilule en forme de cœur et qu’il existera bientôt des offres pharmaceutiques avec en cadeau un canard ou des menottes (roses évidemment) afin que la soirée soit parfaite…
Je m’emballe, pour l’instant le produit sera vendu seulement sur ordonnance, échappant, je l’espère à ce genre d’initiative.
Mais au-delà j’y vois un autre signal. Le signal retentissant d’une norme masculine qui, à travers de la médicalisation, porte à son paroxysme l’objet sexuel que représente la femme.
« Votre femme est cassée, elle ne fait pas ou plus l’amour tous les jours : ne vous inquiétez pas le viagra est là.
Monsieur, les magasines, les médias, les films, les discussions avec vous lui ont bien expliqué que des rapports sexuels, c’est avec régularité, si possible tous les jours, sinon c’est qu’il y a un problème. Après tout, si elle vous aime, il faut bien qu’elle vous le montre.
Ha, elle n’a pas envie ?
Vous en devenez désagréable, frustrés, colérique, instable par ce manque de rapport sexuels (ne vous inquiétez pas vous, monsieur, êtes normal). D’ailleurs, elle verra bien que quelque chose ne va pas. Tout est là pour lui expliquer, lui montrer que le sexe, c’est comme ça.
Alors quoi ?
Evidemment c’est sa faute : elle n’a pas assez de libido. Vous qui l’aimez vraiment, la désirez tous les jours et qui lui montrez de fait votre amour pour elle, vous vous questionnez. Si elle ne vous désire pas tous les jours c’est que : soit elle ne vous aime pas assez - elle le nie bien évidement - soit qu’elle n’a pas « assez » de libido.
Heureusement, grâce au génie pharmaceutique, elle va enfin combler ses lacunes, gommer son évidente tare, être enfin réparée, et avoir envie de vous convenablement. Allez voir le médecin avec elle (elle se sentira accompagnée dans l’épreuve et en confiance) et faites là discuter de son problème afin d’obtenir le sésame par ordonnance : " tu vois chérie, tu étais bien malade mais heureusement, il y a un traitement ! ". Tout ira mieux maintenant, vous pourrez vous endormir sereinement désormais après un petit ébat quotidien.
Alors messieurs, concluons néanmoins par un petit conseil : n’oubliez pas de bien fermer la porte avant d’aller au travail aujourd’hui et lui bloquer tout moyen de communication (en dehors éventuellement de votre numéro, le sexe par téléphone entre deux réunions n’a jamais nui à personne - après tout - et elle devrait y être plus motivée) afin que tout son désir puisse être tourné vers vous exclusivement. Il ne faudrait pas qu’elle aille voir ailleurs en plus alors qu’elle est enfin en bon état de fonctionnement. »
PS 1 : Je n’irais par jusqu’à suggérer que peut-être les hommes ont trop de libido et que cet aspect pourrait également passer par une petite mise sous pilule, disons, verte pour changer.
PS 2 : Je pourrai imaginer un monde où les femmes, tout en cliché sexiste, commercialiserait une pilule pour booster par exemple la capacité d’écoute des hommes… Mais non, un autre monde aussi caricatural ne m’intéresse pas.
PS 3 : Enfin, pour les femmes qui me diront « réellement souffrir de ce manque de libido » je m’en tiendrais à cette idée principale : en effet, dans une société normée selon l’idée qu’il FAUT avoir du désir sexuel, ne pas se sentir dans cette norme doit effectivement faire souffrir et gâcher le quotidien… L’idée étant peut être de s’interroger sur la norme.
Mlbaranne
MediaPart