Le " service national universel " sera-t-il bientôt obligatoire ?

, par  DMigneau , popularité : 0%

Le " service national universel " sera-t-il bientôt obligatoire ?

Un sondage Ifop réalisé pour le JDD, dévoile que 75 % des Français sont favorables à ce que le SNU soit rendu obligatoire. AFP / Ludovic MARIN

Le cabinet de la « secrétaire d’État » chargée de la jeunesse et du " service national universel " (SNU), Sarah El Haïry, vient d’annoncer que le gouvernement planchait sur la généralisation du dispositif, torpillé par un rapport sénatorial publié ce 8 mars. Dans le même temps, un sondage dévoile que 75 % des Français seraient favorables à ce que le SNU devienne obligatoire.

Le débat sur le " service national universel " obligatoire (SNU) est relancé.

Dix jours après les révélations de l’hebdomadaire " Politis " selon lesquelles le SNU serait progressivement rendu obligatoire, un sondage de l’Ifop réalisé pour le " Journal du dimanche " (JDD) montre que 75 % des Français sont favorables à une telle évolution.

Un consensus large quelle que soit l’origine sociale, chez les jeunes comme chez les plus âgés. Au regard des critères d’âge, 81 % des plus de 65 ans adhèrent à ce caractère obligatoire et une nette majorité des moins de 35 ans - 68 % - soutient ce dispositif.

Par ailleurs, la plupart des différentes catégories sociales souhaiteraient que le SNU devienne obligatoire : 84 % parmi les plus aisés, 75 % chez les strates modestes et 64 % auprès des classes les plus pauvres de la population.

Dans le même temps, un rapport du sénateur " socialiste " Éric Jeansannetas, membre de la " Commission des finances ", présenté ce mercredi 8 mars et cité par " Challenges " est venu étriller les premières années d’expérimentation du SNU.

Le document nous apprend, par exemple, que cette phase-test s’est déroulée " de manière bien plus lente que prévu " en 2022 : seuls 32 416 jeunes Français se sont présentés, alors que 50 000 étaient attendus.

Cette première étape n’a - par ailleurs - pas rempli ses objectifs en matière de " représentativité sociale " puisque 33 % des participants en 2022 avaient au moins un parent qui travaille dans les " corps en uniforme ", alors qu’ils ne représentent que 2 % de la population générale.

De plus, d’après les " retours de terrain ", Éric Jeansannetas écrit que le SNU manque de " centres d’hébergement disponibles en été ".

Enfin, le rapport dénonce les coûts exorbitants qu’engendrerait la généralisation du SNU à l’ensemble d’une " classe d’âge " : de 2,4 à 3,1 milliards d’euros par an, comme l’avait mis en évidence un rapport des " Inspections générales " remis au « Premier ministre » en 2018.

TROIS PHASES

Mesure du programme présidentiel du candidat Emmanuel Macron en 2017, le dispositif a été lancé deux ans plus tard, en 2019, auprès de jeunes volontaires de 15 à 17 ans, avec l’objectif de le rendre à terme obligatoire pour toute une classe d’âge ; environ 800 000 jeunes par an.

Le dispositif, qui entend " impliquer la jeunesse française dans la vie de la Nation ", se déroule en trois phases.

D’abord, un " séjour de cohésion " de douze jours dans un centre, rythmé par le lever du drapeau quotidien, au cours duquel les jeunes se voient proposer différentes activités sportives et culturelles ainsi que des modules de formation à propos de la citoyenneté, du " développement durable ", des " premiers secours " ou encore de la défense nationale.

Dans l’année qui suit le " séjour de cohésion ", les jeunes doivent ensuite réaliser une mission " d’intérêt général " auprès d’une association, d’un établissement public ou d’un " corps en uniforme ", là aussi d’une durée de douze jours.

Enfin, une phase " d’engagement volontaire ", civique ou militaire, d’au moins trois mois à un an est proposée à ceux qui le souhaitent.

Pourtant, le SNU, présenté comme " la grande réforme de société du quinquennat " Macron, peine à convaincre. Plusieurs représentants du milieu éducatif et syndical le jugent notamment trop coûteux et trop " militariste ".

Pas de quoi décourager le chef de l’État pour autant.

Dans son allocution du 31 décembre dernier, le président de la République avait indiqué qu’il poserait dans « les toutes prochaines semaines, les premiers jalons de la nouvelle version d’un " service national universel " », lequel pourrait devenir obligatoire.

ARBITRAGE PRÉSIDENTIEL

Selon le cabinet de Sarah El Haïry, « secrétaire d’État » chargée de " la jeunesse " et du SNU, « l’exécutif » continue de plancher sur « les deux hypothèses " qui tiennent la corde " : celle d’une éventuelle généralisation sur le temps scolaire  », qui a sa préférence, et « celle d’un SNU qui ne serait pas généralisé sur le temps scolaire et resterait volontaire, mais inclurait des dispositifs incitatifs comme l’obtention du permis de conduire ou du Bafa  », le " Brevet d’aptitude aux fonctions d’animateur ".

Sarah El Haïry " attend l’arbitrage du président ", dont le calendrier est " assez chargé ".

Si le gouvernement semble vouloir rassurer en pleine période de contestation sociale de la réforme des retraites en affirmant que " rien n’est acté à ce stade " au sujet de la généralisation du SNU sur le temps scolaire, une décision pourrait être prise entre mars et juin.

" Il n’y a pas d’urgence ", temporise une source gouvernementale à l’AFP.

Certains estiment peu opportun de relancer ce sujet.

" Les jeunes n’en veulent pas ! ", martèle la Fage, premier syndicat étudiant.

« C’est mieux d’avoir un débat apaisé et de trouver le moment adéquat
, juge le député " Renaissance " Thomas Gassilloud, président de la commission de " la Défense " de « l’Assemblée nationale ».

Le débat peut être plus tard en 2023.

" Cette mascarade n’apportera aucun des objectifs qui lui ont été fixés ", fustige quant à lui le député (LFI) Bastien Lachaud dont le mouvement milite pour une " conscription citoyenne des jeunes adultes " rémunérée.

Pour l’élu, le gouvernement veut " mettre au pas " la jeunesse.

Sa généralisation continue - par ailleurs - de susciter nombre d’interrogations, notamment sur le plan pratique.

" Comment assurer toute la logistique nécessaire à l’accueil de plus de 800 000 jeunes par an ?

La France manque de structures adaptées pour les faire manger, dormir, bouger, etc. Il manque aussi les adultes indispensables pour les encadrer ", s’interroge le syndicat " Unsa-Éducation ".

Pour l’historienne Bénédicte Chéron, spécialiste des relations " armées-société ", il y a en outre " un vrai sujet de fond sur la question de l’obligation d’un séjour civique. Cela n’existe dans aucune démocratie. "

La Rédaction

Marianne.fr

Navigation