La Belgique en voie d’implosion

, par  DMigneau , popularité : 0%

La Belgique en voie d’implosion

Les résultats des élections législatives et régionales du 26 mai montrent que la Flandre et la Wallonie suivent des chemins diamétralement opposés. La formation d’un nouveau gouvernement fédéral relève de la " quadrature du cercle ".

En 2010, elle avait requis 541 jours ! Le général de Gaulle ne misait guère sur la pérennité de la Belgique. Il avait notamment évoqué le sort de la Wallonie.

La Belgique en voie d’implosion : quand le général de Gaulle avait bien perçu les choses…

Les autorités écossaises et irlandaises ont prévenu le Premier ministre britannique Boris Johnson : un " Brexit " dur pourrait entraîner la dislocation du Royaume Uni.

Mais il est une autre question qui devrait préoccuper les instances européennes : l’évolution de la situation politique belge.

En 2010-2011, alors que le Royaume de Belgique traversait la plus longue crise de son histoire - 541 jours sans gouvernement de plein exercice -, la commission des Affaires étrangères de « l’Assemblée nationale » française avait chargé deux de ses membres d’une « mission d’information » sur le sujet.

Le rapport des intéressés relève notamment le fait que la Belgique présente deux sociétés différentes :

C’est peut-être l’image la plus forte qu’ont laissée les premières heures passées en compagnie des interlocuteurs de la mission (…). Certains ont mis en valeur des domaines précis où cette différence trouverait à s’exprimer. Ainsi, M. Rik Torfs, sénateur, estimait que l’écart entre les cultures économiques des Flamands et des Wallons était très important, les premiers étant plus enclins à " l’esprit d’entreprise " et à " l’innovation ", les seconds penchant plutôt vers le salariat, de préférence dans le secteur public ; (…)

Le fait est qu’effectivement, les liens se distendent entre les deux parties du pays.

S’agissant des médias, la barrière de la langue conduit à ce qu’une très faible partie de la population accède aux médias de l’autre communauté. (…)

Cette coupure est si franche qu’il a été rapporté à « la mission » que, lorsque la chaîne publique francophone - la " RTBF " - a diffusé, en décembre 2006, un pseudo-reportage annonçant l’indépendance de la Flandre et la fin de la Belgique, quasiment aucun téléspectateur francophone n’a songé à basculer sur la chaîne publique flamande - la " VRT " - pour vérifier l’information et voir comment réagissait la partie flamande du pays.

Deux sociétés différentes

Le leader de la " N-VA " (formation nationaliste flamande) Bart De Wever, évoque - lui - deux démocraties distinctes. Et les résultats élections législatives et régionales du 26 mai dernier ne peuvent certes pas le démentir : Flandre et Wallonie empruntent des chemins radicalement opposés.

La première vers " la droite " et l’extrême-droite, la seconde vers " la gauche " et l’extrême gauche.

En Flandre, il ne manque que 5 sièges aux séparatistes (" N-VA " et " Vlaams Belang ") pour détenir la majorité absolue au Parlement Flamand.

Adoptée en 2012, la « Charte pour la Flandre » précise, dans son préambule, que la Flandre forme une nation. Et c’est bien que se situe le problème belge. Car cette " nation flamande " a tout naturellement vocation à devenir un Etat souverain.

Cette évolution rend plus actuelles que jamais ces questions posées par les deux élus français dans leur rapport : La Belgique serait donc condamnée, État si faible que toute crise politique serait l’occasion de poser la question de sa survie, État si artificiel qu’il devrait se briser à l’inéluctable " envol " de la nation flamande.

La devise nationale (« L’union fait la force ») n’aura-t-elle donc été qu’une incantation ?

Au niveau fédéral, la mission d’information dont le Roi a chargé Didier Reynders (" réformateur-libéral " francophone) et Johan Vande Lanotte (" socialiste " flamand) se poursuit depuis plus de deux mois, mais on voit mal comment elle pourrait dégager des pistes positives, tant les points de vue divergent.

La mission relève de la " quadrature du cercle ".

Le rapport français cité plus haut rappelait le docu-fiction « Bye bye Belgium », réalisé par la " RTBF " en 2006.

Et si la réalité était sur le point de remplacer la fiction ?

Ce qui nous ramène à une question qui avait fort préoccupé le général de Gaulle. Lors d’un entretien avec son ministre, Alain Peyrefitte, le 29 juillet 1967, l’homme de Colombey s’était largement épanché sur le sort de la Wallonie :

" Il y a un malaise belge (…) Il ne faut pas exclure qu’il aboutisse à une crise, surtout au cas où l’équation entre les deux fractions viendrait à se rompre. (…) Ils (les Wallons) retrouveraient au sein de la France la fierté d’appartenir à une grande nation, la fierté de leur langue et de leur culture. Le goût de participer aux " grandes affaires " du monde et de se battre pour de grandes causes humaines.

Toutes choses qu’ils ont perdues sans leur association contre nature, imposée par les Anglais, avec les Flamands qui ne les aiment pas et qu’ils n’aiment pas. (…)

Je leur ai dit (à une délégation de Wallons venus le rencontrer) que le jour où la Wallonie, par la voie de ses représentants légitimes, ou de préférence par référendum, déciderait d’être rattachée à la France, nous leur ouvririons les bras de grand cœur. " (2)

En fait, la solution de survie des Wallons à l’incurable mal belge se trouve à portée de main.

Il suffit de vouloir la saisir.

Jules GHEUDE,

essayiste politique belge (1)

MediaPart

Notes :

(1) Dernier livre paru : « La Wallonie, demain – La solution de survie à l’incurable mal belge. »

(2) Alain Peyrefitte, « C’était de Gaulle », tome III, Editions de Fallois/Fayard, 2000.