Italie : " Uber " et consorts s’allient avec un syndicat d’extrême droite pour conclure des accords sociaux " a minima " avec les livreurs
Italie : " Uber " et consorts s’allient avec un syndicat d’extrême droite pour conclure des accords sociaux " a minima " avec les livreurs
ALBERTO PIZZOLI / AFP
En Italie, " Uber ", " Deliveroo ", " Glovo ", " Just Eat " tentent de dissuader l’État de leur imposer des obligations sociales fortes envers leurs livreurs, en concluant un accord social " a minima " avec un syndicat minoritaire proche de la " Ligue du nord ", a révélé le site " Politico " ce 16 septembre.
Une stratégie de contournement.
En Italie, les plateformes de livraison de repas à domicile - " Uber ", " Deliveroo ", " Glovo ", " Just Eat " - ont conclu un accord, révélé le 16 septembre par le site " Politico ", avec un syndicat minoritaire proche de la " Ligue du nord " afin d’éviter que le gouvernement ne les contraigne à accorder des droits sociaux plus avantageux pour les livreurs.
Sur l’impulsion des représentants du " Mouvement 5 étoiles " en son sein, le gouvernement italien a fait adopter en 2019 une loi conférant aux livreurs, toujours considérés comme " auto-entrepreneurs ", des droits de base, comme les " congés maladie " et la « Sécurité sociale ».
Les entreprises de livraison ont jusqu’au mois de novembre pour négocier les conditions d’application de ce texte avec les représentants des livreurs, sans quoi « l’État » interviendra, y compris pour fixer un salaire horaire minimum.
En janvier, la « Cour suprême de cassation » italienne avait en outre considéré que les livreurs de la plateforme " Foodora " - qui a depuis quitté l’Italie - étaient bien des employés.
Si bien que les multinationales de la livraison tentent de prendre de court l’État italien dont ils redoutent qu’il accentue leurs obligations sociales, en concluant un accord a minima avec " l’Unione Generale del Lavore " (UGL), laissant sur le bas-côté les trois grandes organisations syndicales italiennes que sont la " Confederazione Generale Italiana del Lavoro ", la " Confederazione Italiana Sindacati Lavoratori " et " l’Italiana del Lavoro ".
La CGIL s’oppose en effet à tout accord conservant le statut actuel " d’auto-entrepreneurs " des coursiers.
" Pour nous un livreur est un employé, il en a toutes les caractéristiques ", explique à " Politico " le syndicaliste Danilo Morini, de la fédération " transport et logistique " du CGIL.
Soutien de " la Ligue "
" Deliveroo ", " Uber " et consorts sont donc allés toquer à la porte de l’UGL, petit syndicat très lié à la " Ligue du nord ". Son précédent secrétaire général, Claudio Durigon, est un ancien membre du parti d’extrême droite, tandis que l’actuel secrétaire général, Paolo Capone, a publiquement soutenu la " Ligue " lors des dernières élections européennes.
" C’est un important pas en avant qui montre qu’il est possible d’augmenter la sécurité des auto-entrepreneurs en Europe ", s’est félicité auprès de nos confrères le directeur de " Deliveroo Italie ", Matteo Sarzana.
" Cet accord entérine la flexibilité du travail, qui est un point capital et correspond à ce que cherchent les livreurs. Par ailleurs, il leur donne plus de droits sociaux, pour lesquelles des entreprises comme la nôtre sont prêtes à payer ", se réjouit quant à lui le co-fondateur de " Glovo ", Sacha Michaud.
L’accord prévoit un salaire minimum de 10 euros pour les livreurs, des primes pour le travail de nuit et les mauvaises conditions météorologiques, l’achat d’équipements de sécurité et une assurance pour les dommages matériels.
Les plateformes s’engagent également à maintenir « la transparence » de leur système de notation et à ne pas punir les coursiers qui refuseraient des commandes.
Louis NADAU
Marianne