Déni, entre-soi, " éléments de langage " : soirée électorale sans saveur chez Anne Hidalgo
Déni, entre-soi, " éléments de langage " : soirée électorale sans saveur chez Anne Hidalgo
Anne Hidalgo après l’annonce des résultats. Thomas COEX / AFP
La candidate " socialiste " n’a pas dépassé les 2 %. Un naufrage. Mais l’ambiance de sa soirée électorale dans le 14e arrondissement était plutôt aux " éléments de langage " et aux discussions feutrées. Pas loin du déni…
Récit d’une soirée sans grande saveur.
" Il n’y a que des journalistes ! Où sont les militants ? "
Dans la petite file qui mène au " Poinçon ", restaurant à l’allure " bobo " branchée du 14e arrondissement parisien, une journaliste s’amuse. Il est bientôt 19 heures et les fans d’Anne Hidalgo, qui y organise sa " soirée électorale ", se font attendre. Les badges " presse " sont en surnombre.
Plus loin, les cadres patientent sur une petite terrasse.
On comprend bien vite qu’il ne s’agira que d’une tiède formalité, entre verres de bière et plateaux de salade, à laquelle on ne peut pas échapper. Près du bar, un cadre nous confirme qu’Anne Hidalgo appellera à voter Emmanuel Macron, mais promet que face aux caméras on verra une candidate " punchy, pas abattue ".
" ON VA RECONSTRUIRE "
Une candidate visiblement pressée d’en finir. Après un silence de mort lors de l’annonce des résultats, projetés sur un grand écran, la maire de Paris rejoint son pupitre, sous les applaudissements.
" Je vous appelle à voter le 24 avril prochain contre l’extrême droite de Marine Le Pen en vous servant du bulletin de vote Emmanuel Macron ", annonce sans surprise l’édile. Qui ne veut " jamais baisser les bras " : " La gauche du réel nous la reconstruirons, forte, créative, populaire ".
Touchés, mais pas coulés ?
C’est le ton que reprennent de concert les élus " socialistes " présents.
" Je ferai partie de ceux qui mettront de l’énergie pour inventer autre chose ", promet Johanna Rolland, la maire de Nantes.
« Évidemment que notre score ne nous satisfait pas, il est assez déprimant
. soupire Lamia El Aaraje, conseillère de Paris, ancienne députée. Mais on va travailler, on va reconstruire ".
" C’est une déception à laquelle on s’est préparé ", rejoint le " patron " des " socialistes " au Sénat Patrick Kanner, à la recherche de quoi se nourrir entre deux entretiens avec la presse.
LÉGISLATIVES ET MÉLENCHON
Mais les militants n’ont pas tous la même " langue de bois " que les " ténors " du parti.
" Les cadres doivent bouger, il faut de l’air, ouvrez les fenêtres ", s’emporte Anthony, militant depuis 18 ans au " PS " et qui fustige les " apparatchiks ".
" Il faut arrêter de se regarder le nombril, de se partager les postes en interne ", enchaîne-t-il.
Gaston, militant depuis 13 ans confie : « 2017 était plus dure, car on partait de plus haut, là on est parti bas. On savait que ça allait être difficile. »
Beaucoup sont en fait déjà passés à autre chose. Après le barrage à « l’extrême droite » qu’elle appelle de ses vœux, Carole Delga pense aux législatives pour porter à l’Assemblée " des élus qui seront des contre-pouvoirs ".
La présidente de la région Occitanie s’éclipse vite.
Un député discute " en off " avec deux journalistes. Il parle " union de la gauche ", mais sans " les Insoumis ". Comme lui, beaucoup tirent " à boulet rouge " sur Jean-Luc Mélenchon.
« Les " Insoumis " n’ont jamais manifesté l’envie de se rassembler », peste Lamia El Aaraje.
ENTRE-SOI ET FIN DE PARTIE
On tend l’oreille chez les quelques militants restants. L’une est une " fille de politicien ", l’un évoque un " stage en cabinet ", un autre est " candidat " aux législatives. Une jeune fille s’amuse : elle en est à sa onzième interview pour un média…
Un carton est laissé dans un coin, rempli de sacs en tissu à l’effigie d’Anne Hidalgo.
Les serveurs retirent les plats. Ça sent la fin de partie.
Accoudé au bar, un habitant du quartier observe la scène en sirotant sa bière.
« Je voulais voir à quoi ressemblent les derniers reliquats du " PS " », murmure Aimé qui se présente comme une " sorte de sociologue " qui a déposé le matin un bulletin " Insoumis " dans l’urne.
Le bonhomme intrigue.
" Quand je les vois s’exprimer, je ne vois que des éléments de langage , tacle l’ancien militant « d’extrême gauche ». Regardez-les, ils disent que ce n’est pas parce que leurs propositions sont mauvaises qu’ils ont perdu mais parce qu’ils n’ont pas réussi à les convaincre… "
Il est vrai que ça ne sentait pas franchement la remise en question chez les " socialistes ", ce soir.
Hadrien BRACHET
Marianne.fr