Retraites : Ciotti confronté à l’indocilité d’une partie de ses députés
Retraites : Ciotti confronté à l’indocilité d’une partie de ses députés
©Clement MAHOUDEAU / AFP
Qu’ils finissent - où non - par suivre la consigne du chef des " Républicains " en votant la réforme, les quelques parlementaires entraînés dans le sillage d’Aurélien Pradié font suffisamment de bruit pour donner une impression de cacophonie à droite.
" Comme toujours, Aurélien teste les limites. Enfin, là, il s’en approche, quand même… "
Commentaire crispé d’une dirigeante des " Républicains " (LR) sur son vice-président exécutif, Aurélien Pradié, ce mardi 31 janvier.
Deuxième jour de mobilisation contre la réforme des retraites.
À l’aube, au micro " d’Europe 1 ", le député du Lot en a encore fait des siennes. Il a donné sa vision de l’autorité que pouvait avoir son patron, Éric Ciotti, qui appelle ses troupes à soutenir le texte du gouvernement au nom de la " cohérence " idéologique de la droite.
Hostile au report de l’âge légal de départ à la retraite, Pradié dit n’avoir cure des consignes. Et l’élu de lâcher : " Le chef, c’est celui qui est candidat à l’élection présidentielle, soyons très clairs. C’est ça, le vrai chef. Et je n’ai pas le sentiment qu’Éric ait cette ambition-là. "
Traduction : cause toujours Éric, tu n’es qu’un intérimaire avant le lancement en orbite de Laurent Wauquiez.
Autre traduction : je n’ai pas obtenu, comme cela m’a été promis, la vice-présidence " déléguée " de LR ; je dois partager un poste de " numéro deux " au rabais avec François-Xavier Bellamy ; j’ai donc, plus que jamais, tout loisir de cultiver mon image " d’électron libre ".
« Il a fait un score au congrès qui n’a pas été ridicule, mais il a quand même été déçu, car il pensait pouvoir être élu. Donc, il estime devoir " faire de la place " au courant qu’il considère être le sien », décrypte notre source.
Il n’y a pas lieu de surestimer la taille de ce courant, encore moins son niveau de coordination, tant Aurélien Pradié a des méthodes solitaires.
Autorité froissée
Sa " capacité de nuisance ", en revanche, est suffisante pour faire spéculer.
Pierre-Henri Dumont, Julien Dive, Ian Boucard, Fabien Di Filippo, Maxime Minot, Raphaël Schellenberger… Ils sont environ une quinzaine de députés LR à annoncer qu’en l’état actuel des choses, ils ne voteront pas le projet de loi.
Les uns invoquent le mauvais " timing " de la réforme, les autres le fait qu’elle est socialement injuste.
Tous, quasiment, ont en commun d’avoir été ré-élus dans des circonscriptions plutôt rurales ou " péri-urbaines ", où le " Rassemblement national " est très implanté.
La droite " libérale-bourgeoise " à la papa, tragiquement incarnée par Valérie Pécresse à la dernière " présidentielle ", n’y fait plus du tout recette. En cas de dissolution, voire aux législatives prévues en 2027, ils ont tout sauf envie qu’on les renvoie à leurs " chères études " pour leur soutien à la " Macronie ".
Par cet " ersatz de rébellion ", dont on ignore, à date, s’il se traduira par un vote " contre " le texte, ces parlementaires mettent à mal deux choses.
D’abord, " l’architecture " prévue par Élisabeth Borne, qui a " topé " avec la direction de LR début janvier pour s’assurer une majorité solide.
Ensuite, l’autorité d’Éric Ciotti, président du parti depuis décembre. De fait, son incapacité à les faire " rentrer dans le rang " malgré les " concessions " accordées par « l’exécutif » – sur les petites retraites, notamment – en fait un interlocuteur moins fiable pour Matignon.
C’est ce qui explique, sans doute, la réunion improvisée ce mercredi matin, révélée par " le Parisien ", entre Ciotti et Borne. L’élu niçois était accompagné d’Olivier Marleix, patron des députés LR, autre acteur majeur du dossier.
Un " pilier " de la droite parlementaire se veut philosophe : « Les " macronistes " ont tout intérêt à faire croire qu’on ne contrôle pas nos troupes. Ça leur permet de dire qu’ils n’ont pas besoin de nous, qu’on ne leur lie pas les mains… Et si ça nous permet d’engranger des victoires, c’est ce qui compte. C’est à la fin de la foire qu’on compte les bouses. »
Jules PECNARD
Marianne.fr