Démocratie et Aristocratie chez Platon
Démocratie et Aristocratie chez Platon
Notre société " moderne " est construite selon des principes et des régimes vieux de plus de deux mille cinq-cents ans, établis autrefois par des penseurs et des philosophes de l’Antiquité grec.
L’un d’entre eux est pour le moins encore très connu et souvent utilisé comme référence.
Il s’agit de Platon.
Que ce soit lors d’études supérieures, pour le travail ou " la vie de tous les jours ", nous voyons encore des échos de ses écris et de sa philosophie, que nous en soyons conscients ou non.
Toutefois, ses idées politiques ne sont pas - ou presque plus - utilisées de nos jours, notamment en ce qui a trait à sa vision de la démocratie et de « l’aristocratie ».
C’est pourquoi je suggère d’explorer ce sujet.
Avant toutes choses, il serait bon de nous intéresser à la vie de Platon, car bon nombre de ses expériences ont influencées sa façon de voir les choses.
Tout a commencé le jour de sa naissance, en 427 av. J.C., à Athènes. Il est né dans un milieu « aristocrate », sa famille faisant partie des nobles. Déjà, les éléments étaient réunis pour aider Platon à construire sa vision du monde " parfait ".
Il fut un disciple de Socrate qui avait, pour son époque, une manière de penser qui n’était pas très bien accueillie.
D’ailleurs, cette manière de penser lui a apporté plusieurs ennemis, le menant donc à son exécution.
Cet évènement a énormément touché Platon, puisque la mise à mort de son maître était vraisemblablement une plaisanterie des plus macabres, avec plus de votes pour sa condamnation à mort que pour le déclarer " coupable ".
C’était là une preuve flagrante que le système politique ne fonctionnait aucunement. C’est peut-être cela qui l’a poussé à faire une " carrière politique " ; la volonté de redresser ce système atteint d’une terrible gangrène.
Pendant des années, il y a participé activement avant de réaliser à quel point ce mal est profondément ancré chez les hommes et dans le fondement même du système " démocratique " et de soudainement arrêter sa carrière en tant " qu’homme politique ".
Il était dégoûté par ce qu’il voyait. Il était témoin d’un monde " démocratisé " au point de se dérégler, voyant même certains dirigeants devenir de véritables tyrans.
Après cela, il voyage énormément tout en étudiant la philosophie et la politique. Il fonde une école de philosophie - " L’Académie " - écrit son manuscrit le plus célèbre, " La République ", où il aborde des thèmes comme " la politique " et " la justice ", à l’aide de dialogues le plus souvent mettant en scène Socrate et devient même le professeur d’Aristote.
Finalement, il meurt en 348 av. J.C, à l’âge de 81 ans.
Maintenant, nous avons suffisamment de " bagage " pour comprendre - ou du moins essayer de comprendre - sa vision de « l’Homme », des classes sociales et du meilleur régime politique.
Platon croyait en « l’aristocratie ».
Voici pourquoi : à l’idée que « les hommes » sont constitués de seulement deux dimensions, physique et spirituelle, Platon oppose celle qui dit que « les hommes » en ont en réalité trois.
Les besoins ou " désirs ", ou encore " l’instinct animal " en est la première.
La seconde, c’est " le cœur ", le courage, la volonté.
Et la troisième, c’est " la tête " qui symbolise l’intelligence, " l’esprit " ou encore la sagesse.
Platon croyait - et avec raison - que ces trois parties n’étaient pas partagées également chez tout le monde, que certains avaient certaines parties plus développées que d’autres. Par exemple, chez les paysans, les commerçants et les artisans, c’est " l’instinct animal ".
Platon ne pensait pas dans un sens péjoratif, mais plutôt dans le sens où ces gens ont comme " instinct " de subvenir aux besoins de la communauté.
Ensuite, chez les guerriers et les soldats, la partie la plus développée est bien évidement celle du courage et finalement, celle de " l’esprit " est plus présente chez les philosophes.
C’est de là que vient son idée de société divisée en trois classes sociales qui, chacune à sa manière, contribuerait au bon fonctionnement de la cité.
C’est trois classes ont d’ailleurs déjà été nommées plus haut. Les philosophes dirigent la cité par leur " intelligence ", les guerriers la protègent grâce à leur courage et les paysans, commerçants et artisans la nourrissent.
Platon croyait que cette façon de penser était la meilleure et la plus juste, car chacun occupe la place qui lui revient.
Platon savait, du fait de ses expériences dans le " monde politique ", qu’il était impossible que la démocratie puisse fonctionner, car on ne peut pas éduquer les masses également, étant donné que nous avons tous une partie différente qui est plus développée.
D’ailleurs, notre système scolaire en est la preuve de nos jours. Il présente plusieurs lacunes en matière de " sagesse " et devrait être repensé et refait " de A à Z ".
C’est pourquoi Platon croyait fermement que le meilleur régime politique susceptible de durer dans le temps était celui de « l’aristocratie ». Ce régime permet de faire gouverner plusieurs personnes, ce qui réduit les risques de créer des tyrans.
Ces personnes devraient être des philosophes, étant donné que ceux-ci possèdent la sagesse.
Platon avait vu tellement d’actes de folie et d’injustice, qu’il en était venu à la conclusion que la " sagesse " doit gouverner, car elle possède à elle seule la connaissance et la raison.
De plus, « l’aristocratie » étant basée sur le pouvoir aux personnes considérées comme " meilleures " ou aillant une " importance sociale ", répond à l’instinct naturel des êtres humains qu’est la théorie de " la dominance sociale ".
Selon cette théorie, il y a toujours eu - il y a encore et il y aura toujours - des " dominés " et des " dominants ". Nous en avons de nombreux exemples chaque jour :
quelqu’un qui ne peut rien faire s’il ne reçoit pas d’ordre ;
des personnes qui ne disent rien lorsqu’elles reçoivent un manque de respect de la part d’une autre personne ;
des gens qui veulent tout contrôler ;
des personnes qui laissent toujours les autres décider pour eux et des personnes qui prennent toutes les décisions pour tout le monde, etc.
À ce propos, plusieurs exemples de " régimes " répondant à cet instinct et ayant perdurés dans le temps nous prouvent que la vision de Platon sur la politique n’était pas tout à fait erronée.
Chez les peules européens, la monarchie fut le mode de fonctionnement pendant des siècles avant de s’effondrer à cause des erreurs de quelques-uns et de la révolte de plusieurs autres.
En Orient, les empires chinois et les dynasties sont de bons exemples, ces derniers ayant duré encore plus longtemps que les monarchies européennes. Et en Occident, les autochtones, s’ils n’avaient pas été coupés de leur manière de vivre par les colons venus d’Europe, auraient peut-être pu continuer à vivre dans leur petite monarchie, gouverné par un chef de village, comme ils avaient fait pendant des milliers d’années.
Malheureusement, toute chose a une fin et l’on peut constater que les exemples donnés plus haut de système ayant duré pendant des siècles ont également connu une fin, parfois tragique, parfois si lente que l’on ne s’en est aperçu que plus tard.
C’est une loi dans la nature ; tout est cyclique, donc tout a une fin. Mais outre le fait que tout se termine un jour ou l’autre parce que " la nature " est ainsi, nous pourrions nous demander quelle est la cause de cette fin.
Ce n’est certainement pas à cause de la vieillesse, puisque nous ne parlons pas d’un être vivant, mais d’un régime politique. Platon croyait qu’il y avait un mal rattaché à " la politique ". Il croyait également que le mal est inhérent aux Hommes et que c’est à cause de cela que ces régimes politiques finissent toujours par s’effondrer.
Je ne crois pas que le mal soit inhérent aux Hommes, mais je crois tout de même que Platon, à son insu, avait réussi à mettre le doigt sur la vraie raison dans son manuscrit " La République ". Lors d’un dialogue de Socrate, ce dernier imagine la cité idéale, la cité comme elle était à son commencement. C’est alors qu’il reçoit la remarque que son idéal n’est pas " très idéal ", puisque selon son idée, il n’y a pas de luxe et tout le monde travaille pour " le bien " de la communauté.
Socrate fait alors remarquer que c’est lorsque l’opulence entre en jeu que les Hommes deviennent injustes. Nous le voyons dans notre monde, centré sur la consommation et sur l’argent, que c’est bien le luxe qui détruit l’Homme " à petit feu ", le poussant à commettre des actes parfois terribles pour assouvir sa soif de biens et de plaisirs éphémères.
Mais ce ne sont que cela ; des biens éphémères.
Avons-nous déjà entendu parler de quelqu’un qui a emporté ses jeux vidéo, ses plats gastronomiques préparés en restaurent ou ses vêtements de marques avec lui lorsqu’il est mort ?
Non.
Et avons-nous déjà entendu parler de quelqu’un de riche qui se contente de ce qu’il a et ne se procure plus aucuns biens superflus, voyages ou activités ?
Non.
Pourquoi ?
Parce que toutes ces choses n’apportent pas le bonheur, ils apportent le plaisir. Et c’est ce plaisir fugace et quasi irréel que nous recherchons, parfois à n’importe quel prix, parce que la société a réussi à nous faire croire que c’est ça " le bonheur ".
Platon avait compris que ce n’était pas vrai, il n’avait simplement pas compris que c’est ça le mal qui met fin à tous les régimes politiques. Souvent, ils se terminent parce que quelqu’un avait un désir d’ostentation.
À présent, avec l’aide de toutes les informations citées plus haut, je propose l’analyse du système " démocratique " au sein de notre pays.
Nous avons eu droit à des élections dernièrement qui n’ont servies à rien, puisque rien n’a changé. Ici, prenons un instant pour se demander le motif qui a poussé notre « Premier ministre » à déclencher des élections.
Il avait un gouvernement minoritaire, il en voulait un majoritaire. Il voulait plus de pouvoir, ce qui est une forme de luxe…
Est-ce que ce serait donc " le commencement de la fin " de notre " démocratie " ?...
Mais revenons à nos moutons. Il serait bon de nous demander pourquoi il semble que ce sont toujours les mêmes politiciens dont nous entendons parler et pourquoi ce sont souvent les mêmes partis qui se font élire.
Nous ne sommes pas sans savoir que les partis reçoivent des fonds pour aider à leur " campagne électorale ". Seulement, certains sont mieux financés que d’autres et donc ils se font mieux connaître. S’ils se font mieux connaître, ils ont plus de chances de se faire élire.
Si ce sont ceux qui ont plus d’argent qui remportent la victoire, alors nous parlons là d’une " ploutocratie ", ce qui est tout sauf " démocratique ".
De plus, lors des campagnes électorales, les candidats nous font tout plein de belles promesses pour nous amadouer. Cela s’appelle une démagogie. C’est une " politique " dans laquelle nous flattons les assemblés pour obtenir le pouvoir. Là encore, nous ne parlons pas d’une vraie démocratie. Et les citoyens, au lieu d’élire quelqu’un pour ses idées qui serviront le « bien commun », nous nommons quelqu’un qui sert notre propre intérêt, répondant ainsi à notre quête toujours plus grandissante d’avoirs et de plaisirs.
Moins de taxes, moins de chômage, moins de travail, plus d’argent, plus de biens, plus d’activités… Tout cela est la conséquence de notre " société de consommation " qui nous pousse à vivre dans le luxe et la cupidité.
Pour conclure, nous avons maintenant parcouru ensemble la vie et les idées de Platon et nous avons analysé notre " démocratie " en utilisant ces dernières, que Platon nous a transmises.
Je crois que notre société devrait ouvrir les yeux sur les problèmes qui la constituent. À l’exemple de l’homme qui sort de la caverne dans " L’Analogie de la Caverne ", nous devrions tous prendre conscience que ce sont les valeurs que prône notre société qui sont à l’origine de tous les problèmes, comme au temps des philosophes grecs.
Il serait peut-être temps de se demander pourquoi notre société tend à recréer les mêmes erreurs et à imiter le même mode fonctionnement qu’il y a plus de deux milles ans, alors qu’à l’époque, nous avions observé les mêmes problèmes.
Fallait-il vraiment l’expérimenter par nous-même pour croire à son échec ?
Angèle TREMBLAY
AgoraVox.fr